
Quand la direction « ne croit pas » aux relations publiques : comprendre le nœud… et le défaire
Dans plusieurs organisations, les équipes de relations publiques (RP) sont mises à contribution trop tard. On les sollicite pour « diffuser un communiqué » ou « gérer les médias » alors que les risques réputationnels sont déjà bien installés. Ce n’est pas qu’une question de culture. On doit apporter la preuve que les RP réduisent les risques, protègent la réputation et orientent la conversation publique. Répéter que « les RP, c’est important » ne suffit pas.
C’est un défi que plusieurs clients nous confient : leur mandat est clair, mais ils doivent d’abord convaincre leur comité de gestion de l’utilité des RP au-delà du communiqué de crise. Ils savent que des relations publiques stratégiques et réfléchies peuvent changer la donne, mais doivent encore et toujours prouver leur valeur avant de pouvoir les déployer à l’externe.
Encadrer tôt, là où ça compte
La démonstration commence dès le début du projet, avant que les décisions soient coulées dans le béton. Attendre d’être « invité » condamne les RP à un rôle de diffuseur. Encadrer tôt, c’est poser un cadre stratégique simple : quelle histoire veut-on raconter, à qui, pourquoi maintenant, et quelle perception veut-on ancrer?
Un simple sommaire exécutif suffit pour aligner l’équipe et éviter le mode réactif. Ce cadrage ne sert pas à bien paraître : il réduit le risque réputationnel. Plus tôt on clarifie le récit, moins on laisse aux autres le soin de définir l’histoire à notre place. Et surtout, on donne aux porte-paroles une ligne directrice cohérente.
Parler d’impact, pas de nombre de mentions
Faire valoir les RP par le nombre de mentions médiatiques convainc rarement un comité de direction. Ce qui importe, ce sont les résultats tangibles : qu’advient-il lorsqu’on perd le contrôle de la narration ? On peut imaginer qu’un concurrent saisira l’occasion de rebondir, ou qu’une histoire négative émergera sans qu’on y soit préparé. Cela pourrait avoir des répercussions directes sur des partenaires ou des clients qui se montreront tout d’un coup réticents.
Par exemple, annoncer une acquisition sans en expliquer la logique stratégique peut donner lieu à des interprétations erronées, ce qui peut affecter négativement la confiance des investisseurs, l’engagement des employés et la fidélité des clients. En d’autres termes, communiquer clairement cette idée équivaut à parler le langage de la direction.
Poser les bonnes questions, au bon moment
L’importance des RP réside dans l’analyse approfondie de l’écosystème : les attentes des médias, les perceptions du public et les exigences des parties prenantes. C’est souvent lorsque cette analyse est superficielle que des malentendus peuvent surgir.
Intervenir tôt, c’est aussi poser les questions qui élèvent la discussion : si on ne guide pas l’histoire, quel angle risque de s’imposer? Que peut-on dire de vrai et vérifiable aujourd’hui, sans compromettre notre crédibilité demain? Quel momentum veut-on créer et comment le mesurer?
Rendre visible la réflexion
Souvent, le seul livrable visible des RP est le communiqué ou l’article publié. Or, la valeur se joue en amont : veille médiatique et analyse du contexte et des forces en présence, évaluation des risques, identification et préparation des porte-paroles, stratégie de séquencement. Rendre cette pensée visible, par des notes d’analyse ou un registre des occasions médiatiques, aide la direction à voir l’intelligence derrière l’exécution. Quand on a la preuve de sa validité, on a tendance à l’inclure plus tôt dans le processus la prochaine fois que l’occasion se présente.
Un plan de jeu simple
Passer du rôle de soutien à celui de partenaire ne demande pas une lourde machine. Quelques gestes suffisent :
- Produire une fiche synthèse sur l’enjeu réputationnel, les publics prioritaires et les angles narratifs.
- Envoyer un court sommaire après chaque rencontre avec son client : ce qui se dit, ce qui pourrait se dire, et une recommandation.
- Tenir un registre des occasions manquées et saisies de retombées pour illustrer l’impact des RP dans le temps.
- Choisir un indicateur d’impact au-delà de la couverture (ex. : qualité des demandes médias, crédibilité auprès des publics cibles) et le suivre.
Atterrir avec crédibilité
On ne gagne pas sa place à la table en plaidant la vertu des RP. On la gagne en prouvant, projet après projet, que la fonction sert la stratégie. Encadrer tôt, parler d’impact, poser les bonnes questions au bon moment et rendre la réflexion visible : voilà comment on passe du rôle de diffuseur à celui de partenaire stratégique.
Pour ceux qui doivent convaincre leur comité de gestion : ce n'est pas un plaidoyer qu'il vous faut, c'est une démonstration. Commencez petit, documentez l'impact, parlez le langage des risques et des occasions. La crédibilité se construit projet après projet.